forfait jours CCN syntec
L’accord forfait jours syntec a été le premier accord de branche conclu en 1999
Le forfait-jours, a été instauré pour les cadres par la loi sur les 35 heures ; auparavant ces derniers n’étaient soumis à aucune disposition spécifique, sur le temps de travail.
Dans l’arrêt du 29 juin 2011, la Cour de cassation procède à un revirement de jurisprudence concernant les forfaits-jours. Si la Cour ne remet pas en cause les forfaits-jours, les employeurs doivent en revanche « respecter les stipulations conventionnelles relatives aux modalités de suivi de l’organisation du travail des salariés soumis au forfait-jours » (Communiqué de la Cour de cassation).
L’arrêt est rendu au visa du « droit à la santé et au repos », qui est « au nombre des exigences constitutionnelles ».
1) La mise en place du forfait-jours : nécessité d’un écrit
La loi Aubry 2 n° 2000-37 du 19 janvier 2000 a instauré un nouveau mode de décompte du temps de travail pour les cadres.
A cet égard, les cadres qui n’entrent ni dans la catégorie des cadres dirigeants ni dans celle des cadres astreints à l’horaire collectif de travail peuvent être soumis à un forfait-jours travaillés à l’année (c. trav. ; art. L. 3121-43).
Ceci est possible dès lors qu’un accord collectif étendu et un accord d’entreprise ou d’établissement en permet la mise en œuvre. L’employeur doit également conclure une convention avec le salarié concerné.
La loi n° 2005-882 du 2 août 2005 a étendu ce dispositif aux salariés non cadres qui disposent d’une autonomie dans l’organisation de leur temps de travail.
En pratique, les salariés au forfait-jours ne sont pas tenus de respecter :
– La durée légale hebdomadaire de travail de 35 heures ;
– La durée quotidienne maximale de travail de 10 heures ;
– Les durées hebdomadaires maximales de travail de 48 heures.
Pour compenser ces journées à rallonge, le nombre de jours travaillés dans l’année fixée par l’accord collectif ne peut excéder 218 jours.
2) L’arrêt du 29 juin 2011
Un salarié bénéficiait du forfait-jours ; un accord de la branche métallurgie autorisait le recours au régime du forfait-jours à condition que l’employeur établisse un document de contrôle des journées et demi-journées de travail, des temps de repos et congés et effectue un suivi régulier de l’organisation et de la charge de travail.
Le salarié soutenait que sa convention de forfait lui était inopposable car l’employeur n’avait pas respecté les dispositions de l’accord de branche. Il demandait le paiement d’heures supplémentaires.
La Cour d’Appel a débouté le salarié mais la décision d’appel vient d’être cassée par la chambre sociale de la cour de cassation. Elle considère que l’accord de branche est conforme à la loi.
Elle décide que les défaillances de l’employeur font que la convention forfait-jours conclue avec le salarié est « privée d’effet ».
La Cour de cassation opère ici un revirement de jurisprudence puisque, dans un arrêt du 13 janvier 2010, elle avait jugé que le défaut d’exécution par l’employeur des stipulations conventionnelles relatives aux modalités de suivi de l’organisation du travail des salariés soumis au régime du forfait-jours ne remettait pas en cause la validité de la convention organisant ce régime mais ouvrait seulement droit à des dommages-intérêts pour le salarié concerné.
Ce dispositif de suivi parait essentiel pour la validité du forfait en jours compte tenu des exigences constitutionnelles et du droit de l’Union Européenne. La force de ce dispositif réside dans la nature de la sanction applicable. L’octroi de dommages-intérêts affaiblissait l’efficacité du système de suivi car le forfait-jours n’était pas, lui-même menacé.
Le « défaut d’effet » du forfait-jours, c’est-à-dire en fait sa nullité, aura pour conséquences que le salarié pourra réclamer le paiement des heures supplémentaires travaillées. Il pourra aussi réclamer l’octroi de dommages-intérêts pour non-respect de son droit au repos.
3) A quelles conditions le forfait-jours est il valable ?
Les entreprises vont donc devoir repenser les modalités d’exécution du travail des salariés en forfait-jours. De nombreuses entreprises avaient déduit qu’elles pouvaient s’affranchir de tout contrôle sur le volume et le rythme de travail de leurs salariés au forfait-jours.
Le système du forfait-jours permet aux entreprises de bénéficier de plus de souplesse, de flexibilité mais pas à n’importe quelles conditions.
La Cour de cassation veut faire de la santé du salarié un élément essentiel de la relation de travail et imposer le respect des principes généraux de la protection de la sécurité et de la santé des salariés.
Rappelons que l’arrêt du 29 juin 2011 est rendu au visa « que le droit à la santé et au repos est au nombre des exigences constitutionnelles ».
3.1) Condition 1 : l’employeur doit tenir un entretien annuel sur les forfaits-jours de l’article L. 3121-46 du code du travail
L’employeur doit organiser un entretien annuel au moins une fois par an comme l’exige l’article L.3121-46 du code du travail. L’objet de cet entretien est d’opérer un suivi de l’activité du salarié et de s’assurer que ses conditions de travail n’altèrent pas sa santé.
Aux termes de l’article L. 3121-46 du code du travail, un entretien annuel individuel doit être organisé par l’employeur, avec chaque salarié ayant conclu une convention de forfait-jours sur l’année. Il porte sur la charge de travail, l’organisation du travail dans l’entreprise, l’articulation entre l’activité professionnelles et la vie personnelle et familiale, ainsi que sur la rémunération du salarié.
L’entreprise doit s’assurer que le forfait-jours permet au salarié de concilier « vie professionnelle et vie personnelle et familiale » ; autrement dit, le code du travail exige que l’employeur s’immisce dans la vie privée de son subordonné, ce qui va très loin.
En pratique, les entreprises s’affranchissent souvent de l’entretien prévu par le code du travail ; donc de nombreux salariés pourraient prétendre à ce que le forfait-jours leur soit inopposable.
Il est conseillé aux entreprises de mettre en œuvre au plus vite un entretien « forfait-jours », faute de quoi la sanction sera redoutable.
3.2) Condition 2 : la durée du travail du salarié sous forfait-jours doit être « raisonnable »
L’accord de branche ou d’entreprise peut définir les modalités de suivi et de contrôle de l’activité et de la charge de travail du salarié.
Dans ce cas, les dispositions de cet accord doivent être respectées par l’entreprise, faute de quoi, encore, une fois la convention de forfait sera « privée d’effet ».
Il n’est pas nécessaire de réintroduire la durée maximale de 48 heures par semaine mais il est important que l’entreprise soit en mesure de s’assurer que la durée hebdomadaire du travail est « raisonnable ».
L’accord concernant le secteur de la métallurgie est un bon exemple à suivre puisqu’il mentionne le respect des repos journaliers et hebdomadaires et met en place une politique de contrôle et de vigilance de la charge de travail.
Si la Convention collective peut ainsi compléter le dispositif légal, voire même suppléer aux carences dénoncées par le Comité européen des droits sociaux, la sanction attachée à un défaut de respect des dispositions conventionnelles est essentielle.
Une telle sanction apparaît non seulement comme le moyen d’assurer l’effectivité des principes de la sécurité des travailleurs applicables, mais aussi comme le moyen de consolider le dispositif légal au regard des critiques qui avaient pu être élevées à son encontre.
Ceci conduira probablement les partenaires sociaux à redéfinir les conditions d’exécution des forfaits-jours pour qu’ils puissent être compatibles avec les exigences du « droit à la santé et au repos des salariés ».